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Comme d’habitude je quitte mon hôtel vers 9 heures pour ma première étape entièrement en pays Arabe. Je vais pouvoir enfin tester mes connaissances en Arabe que j’ai étudié pendant 6 mois.

Ma route va me mener de Lattakia vers Tartus, une centaine de kilomètres. En fait, la  route est une autoroute à 4 voies, avec une belle bande de détresse bien large, où je roule en toute tranquillité. La est absolument plate et longe la mer. La journée va être facile. Ce sera une belle journée.

Au bout d’une heure de route, je remarque à ma droite quelque chose qui attire mon attention. Je ne distingue pas tout de suite ce que cela peut bien être, tellement c’est inattendu. On dirait des fusées  ou des missiles! Quelque chose dans ce genre la en tout cas. Mais cela est impossible : Deux fusées à quelque 300 mètres d’une route où chaque jour des milliers et des milliers de voitures passent ! De plus, il manque tout ce qui caractérise normalement les emplacements militaires : Il n’y a ni mur de protection, ni barbelés, ni tour de surveillance, et ni panneau disant qu’il est interdit de prendre des photos. Pas la moindre présence militaire ou autre signe indiquant que je me trouve près d’un endroit sensible. J’aurais pu facilement marcher les quelque 300 mètre et les toucher ! Seule explication plausible : Ce doivent être des vieux trucs que les militaires ont parqués, voire exposés là. La dessus, je sors ma caméra et prends deux photos. Jamais je n’aurais pris de photo si j’avais su que c’étaient des objets militairement sensibles. Je savais dans quel pays je me trouvais tout de même !

Je n’ai même pas eu le temps de remballer ma caméra, qu’un militaire surexcité me saute dessus et m’injurie. Il est aussitôt rejoint par quelqu’un d’autre en vêtements civils, qui me gratifie des mêmes compliments. Constatation : Je ne comprends pas le moindre mot de ce qu’ils racontent. Et pour cela j’ai appris l’Arabe pendant six longs mois ! Moi j’ai appris l’Arabe littéraire, alors que eux, ils parlent, ou plutôt crient en Syrien. Ma caméra m’a tout de suite été arrachée des mains. Les deux excités téléphonent nerveusement; je remarque que leurs mains tremblent.

Je regerde autour de moi : Deux voitures sont stationnées de l’autre coté de la route ; ce doivent être les leurs. A ma droite des maisons d’habitation. Si près de missiles ? Et puis je me demande : Comment diable ont-ils fait pour m’arrêter si vite ? Ce ne peut pas être un hasard. Mais sur le moment je ne me pose pas cette question. Ce ne sera que le jour de ma sortie, que les pièces se mettent en place l’une après l’autre.

Mais ça, c’est pour plus tard.

Entretemps j’ai ouvert tout tranquillement ma sacoche arrière et pris mon ravitaillement. Je m’assieds quelques mètres plus loin sur le mur californien, qui borde le coté droit de la route, et mange d’abord une banane, puis j’ouvre un paquet de biscuits. J’en offre aux deux excités, qui refusent rageusement.  Moi,  j’attends  la suite des évènements.

Finalement une vieille Peugeot 504 arrive avec à bord deux civils et un  militaire. D’après le respect qu’on lui témoigne, ce doit être quelqu’un de haut placé, même s’il ne porte pas le moindre signe distinctif à son treillis militaire.

Il  me salue poliment, je lui tends mon passeport, qu’il examine soigneusement. Dans un bon Anglais, il me demande ma version des faits. Puis :

« Ne t’inquiète pas, tout cela n’est qu’un malentendu. On va effacer ces photos, et puis tu peux repartir. « 

“Don’t worry, Mister, “WELCOME TO SYRIA”

Les deux hommes qui m’ont arrêté n’aiment pas le toon d enotre conversation, bien qu’ils ne parlent pas un mot d’Anglais. Ils commencent à crier de plus belle, vont jusqu’à insulter le gradé. Au bout d’un moment celui-ci cède :

-          On va t’emmener au poste, juste pour quelques vérifications, ensuite tu peux repartir. « 

-          Et mon vélo ?, Je ne puis le laisser ici !

-          On l’emmène aussi,

-          Jamais il ne rentrera dans votre voiture, avec toutes mes affaires.

-          C’est juste ; Alors tu vas rouler en vélo, et nous on te suit, et on t’indiquera le chemin.

Et, c’est ainsi que je reprends la route, suivi de la vieille 504, jusqu’au poste de Jablah

Le bureau du militaire est vaste, avec  4 fauteuils disposés autour d’une table basse. J’inspecte la pièce, et ne compte pas moins de 5 portraits géants de leur président (Dont 3 identiques !), plus deux autres de son père défunt. Décidément la clan Assad va remplacer sans problème les portraits et statues de Kemal Attatürk, que j’ai croisé tout le long de ma route en Turquie.

Sur un ton de conversation on me questionne sur mon voyage, se montre intéressé, voire impressionné. Durant ce même temps, le responsable dicte un rapport sur mon arrestation a son secrétaire (Car il n’y a pas de femmes dans l’édifice) le tout interrompu régulièrement par des coups de téléphone. A un moment donné, ce doit être quelqu’un d’important, car il ferme la fenêtre et fait signe à ceux présents dans la pièce de se taire. A sa mine, je vois qu’il y a du nouveau. Il met mon passeport avec le rapport de son secrétaire dans une enveloppe qu’il scelle. Mon appareil photo, lui,  passe dans un sachet plastique noir. Puis :

-          Il n’y a aucun problème, Monsieur Raymond, mais mon chef à Lattakia aimerait vous rencontrer personnellement.

-           ?

-          On va vous ramener à Lattakia

-          Et mon vélo ?

-          On l’emmène aussi.

Je ne serai pas à Tartous ce soir…..